Serge Diaghilev et les ballets russes

Né en 1872 Serge Diaghilev est élevé par ses grand-parents à Perm. Ces derniers, et particulièrement sa belle-mère, sont mélomanes et lui inculquent le goût de la musique. Puis il vient à Saint-Petersbourg pour accomplir ses études de droit. Il étudie aussi la musique et le chant au conservatoire. Son professeur, Rimsi Korsakov lui déconseille de persévérer car il lui trouve peu de talents.

A Saint-Pétersbourg, Diaghilev mène une vie de dandy dans un milieu d’artistes. Il rencontre Alexandre Benois et Léon Baskt, artistes avec qui il travaillera toute sa vie. A la sortie de ses études il se tourne vers une carrière d’organisateur d’exposition. Par exemple en 1897, il organise une exposition d’aquarelles allemandes et anglaises. Il gagne l’amitié du grand duc Vladimir, Chtchoukine et Morosov. Et leur demande aussi de l’aide pour financer ses projets.

Recruté par le Grand Opéra de saint Saint-Pétersbourg, il rencontre les danseuses Pavlova et Karsavina et le chanteur Fedor Chaliapine. S’il discerne tout de suite l’exceptionnel potentiel de ces artistes, il ne peut pour le moment l’exploiter faute d’entente esthétique avec la direction. En revanche, l’idée lui vient d’exporter l’art russe en Occident et choisit Paris pour faire connaître son art.

Il obtient en 1906 une bourse par la Cour de Russie pour présenter à l’Opéra de Paris le Boris Godounov. Là encore, Diaghilev rencontre des difficultés d’ordre financier et esthétique et présente alors ses spectacles au Châtelet puis au théâtre des Champs Elysées. Un rapport à la Cour de Russie ne lui est pas favorable et on lui interdit d’exporter l’art russe à Paris.

Diaghilev fait alors jouer ses relations pour continuer à faire jouer la troupe dont les représentations interpellent les observateurs de la modernité. En effet, les décors et les costumes de Léon Baskt sont teintés de couleurs de feu. L’artiste utilise les couleurs complémentaires comme le rouge et le vert pour mettre en valeur des personnages tirés du folklore russe. Mais la Grèce archaïque tout comme l’Orient s’invitent aussi dans la danse.

Nijinsky, chorégraphe et danseur mais aussi amant de Diaghilev, est d’une inventivité formidable. Avec Baskt ils inventent une danse qui mélange la tradition orientale et réalise des spectacles inouïs. Par exemple, dans L’Oiseau de Feu dont la musique est de Stravinsky, on distingue des attitudes de Garuda ou du dieu Vishnu. Certains décors s’inspirent directement des reliefs assyriens du Louvre.

Après la Révolution russe de 1917, Diaghilev est contraint de quitter définitivement la Russie. Il produit à nouveau sa troupe à Paris et propose à Picasso de réaliser les costumes de Parade. Puis, il rencontre Debussy qui crée la musique tirée du poème de Mallarmé Prélude à l’après-midi d’un faune. Si la chorégraphie de Nijinski choque par sa sensualité sauvage, la modernité des gestes marque durablement les contemporains.

La compagnie de ballets créée par Diaghilev donnera 19 saisons de spectacles à Paris entre 1909 et 1929, année de son décès. La nouveauté, la fraîcheur et l’inventivité des danses font que les ballets remporteront un grand succès. Diaghilev propose à Picasso de créer décors et costumes du ballet “Parade”. Cela permet de se tourner vers l’avant garde internationale et Diaghilev se détache peu à peu de ses décorateurs russes.

Pour ceux qui l’entourent Diaghilev apparaît comme sévère et exigent, mais ce qui compte avant tout, c’est sa troupe. En effet, il se dépense sans compter pour elle et peut faire preuve d’une immense gentillesse. En contrepartie, il se permet de lancer aux danseurs des phrases parfois assassines.

Quand il meurt à Venise en 1929, il ne reste que les proches, Boris et Serge, les favoris qui partageaient sa vie. Ce sera sa grande amie Coco Chanel  qui règlera les obsèques. Sa succession plus que houleuse entraîne la dispersion d’une immense collection de textes, manuscrits, partitions et livres rares.