Lola Montès une femme fatale envoûtante. Connue pour avoir fait chavirer le roi Louis de Bavière, Lola Montès est aussi une aventurière qui dansa dans le monde entier. Sa carrière palpitante est aussi le reflet de toute une société.

Marie Dolorès Gilbert alias Lola Montes naît en Irlande en 1821 d’un père de petite noblesse et d’une mère issue d’une famille de commerçants. Son père, officier du 44eme régiment d’infanterie est nommé aux Indes . Lola a alors 5 ans et le monde qu’elle découvre est fascinant. C’est une nounou indienne qui l’élève et l’initie aux mystères des dieux et déesses. Lola est une petite fille excentrique mais sauvage, dotée de beaucoup d’imagination. Son père meurt du choléra et sa mère épouse en seconde noce un général, le major Craignie. Ce dernier, inquiet de l’éducation frivole de sa belle-fille, l’envoie dans une pension en Angleterre.

Là, elle croit en grâce et beauté mais sa fougue inquiète ses professeurs. On lui propose un premier mariage qu’elle refuse puis jette son dévolu sur le lieutenant Thomas James qui l’épouse. Le couple retourne en Inde mais s’effrite assez vite. Lola gagne alors l’Angleterre. A Londres, elle se lie avec une actrice qui lui donne sa chance au théâtre puis se ravise. En effet, elle juge qu’avec une telle beauté la jeune fille doit plutôt danser. Ainsi apprend-t’elle la danse espagnole et prend le nom de Lola Montès à une époque où la mode espagnole traverse toute l’Europe. On l’engage alors au théâtre de Londres sous le titre de danseuse principale au theatro real de Séville. Mais le directeur se rend compte qu’il a été grugé et la renvoie aussitôt.

Lola mène alors une vie de scandale en Pologne, se produit en Prusse et à Berlin. Mythomane sans doute, elle s’invente des origines mystérieuses, fascine par sa beauté sulfureuse et intrépide. Elle intrigue et fascine à la fois. Mais à Paris, elle est très critiquée. On peut dire que mademoiselle Lola a les pieds petits et de jolies jambes. Quant à la manière de s’en servir c’est autre chose…Nous soupçonnons mademoiselle Lola d’être plus forte à cheval que sur un plancher. La musique la danse et l’opéra ont un grand succès dans toute l’Europe. Si certaines danseuses font une carrière très brillante, la danse en elle-même est toujours considéré comme un art secondaire.

Pour autant, Lola se produit au théâtre de la Porte saint-Martin en 1845 et fait ses débuts dans le rôle de Dona Seraphina. Elle excelle dans la cachucha dont elle s’est fait une spécialité. A la fin du spectacle c’est un feu d’artifice de bouquets de fleurs. Les rigoristes diront qu’elle se permet des choses contre les règles. Qu’importe ! Elle se produit dans divers capitales mais la danse n’est qu’un moyen de faire parler d’elle. En effet, ses spectacles sont des fiascos successifs, mais on parle beaucoup des scandales qu’elle provoque. Ce sont eux qui forgeront le mythe de cette danseuse que l’on perçoit plutôt comme une femme fatale.

Elle rencontre alors un journaliste, Léon Dujarier avec qui elle vit une passion fulgurante. Mais ce dernier se fait tuer en duel et pour Lola, c’est non seulement un chagrin immense mais aussi une rupture avec Paris. Elle part en Allemagne, a une liaison passionnée mais brève avec Franz Listz. Et de dépit, décide de séduire un prince. L’Allemagne est selon elle le pays idoine. Aussi se rend-elle à Munich et provoque de petits scandales pour être présentée à Louis de Bavière. Elle y parvient et dès que le roi la voit, il tombe amoureux. Elle a 25 ans et lui, 60 ans, c’est un amour platonique où elle l’écoute parler plus qu’elle ne lui parle puisqu’elle ne connaît pas l’allemand.

Le roi est un moderniste, il a une passion pour la Grèce et l’Italie, il aime les arts et les sciences et fait progresser son pays. Il est démocrate et libère la presse. L’Allemagne à cette époque un pays en paix et en pleine prospérité. Mais lorsque Lola se produit sur scène, des huées se mêlent souvent aux applaudissements lorsque le rideau tombe. Le roi est ulcéré devant ce dédain de la beauté parfaite. Aussi, six mois après sa rencontre avec Lola, il change son testament et lui lègue une somme rondelette. Louis l’installe ensuite dans un superbe palais à Munich ce qui déplaît aux Munichois. Ils pensent que Lola a une très mauvaise influence sur le roi.

L’archevêque de Munich se rend chez le roi pour le conseiller de rompre avec le scandale. Le roi l’éconduit. Un jeune homme se rend chez Lola avec un chèque émis sur la banque de Londres qu’il lui remet à condition qu’elle quitte le territoire. Lola déchire le chèque. Le roi mis au courant de ce désintéressement proclame Lola comtesse de Lansfeld, baronne de Rosenthal. Cela provoque une déferlante de protestations. Ministres et fonctionnaires fomentent une révolution dans laquelle la haine de Lola dépasse de loin les revendications politiques. Un jour la foule se presse à la fenêtre de Lola qui ouvre la fenêtre et boit une coupe de champagne à leur santé.

Après une telle scène, on pense que le souverain pourrait s’incliner. Mais il répond en renvoyant ses ministres et en fermant les universités. La réaction ne se fait pas attendre, la révolte se déploie de façon si dangereuse que le souverain doit faire expulser Lola d’Allemagne. Lola se rend alors dans diverses villes et se rend en Angleterre où elle rencontre un certain Trafford qui tombe vite amoureux d’elle et l’épouse. Mais il se lasse très vite des colères de Lola et de son autorité. De plus sa famille apprend que le lieutenant James resté en Inde n’avait jamais demandé le divorce. Si bien que l’on traîne Lola en justice pour bigamie.

Après la mort de Trafford, son accusation tombe. Elle décide alors de refaire sa vie aux Etats-Unis et arrive à San Francisco. Le voyage a été éprouvant mais elle réussit à se produire dans les saloon. Cela marche un temps jusqu’à ce qu’elle décide de se rendre à New-York où on lui conseille d’aller plutôt en Australie. Ne tenant pas compte de sa mauvaise santé, elle se produit à Melbourne où ses spectacles sont appréciés, mais elle tombe malade. Aussi retourne-t’elle aux Etats Unis où sa carrière de danseuse s’achève.

Lola Montès écrit alors un petit livre sur l’art de la beauté. Elle y donne des recettes d’onguents et d’élixir pour la peau et les mains. Certaines pages sont dévolues à l’art de se tenir afin d’être le point de mire de tous. Rien de moins étonnant pour celle qui fut la plus belle femme d’Europe. Mais sa santé se dégrade et à 40 ans, son corps s’use. Elle rencontre alors un jeune pasteur méthodiste qui lui fait comprendre que la vie qu’elle mène n’est pas le bon chemin. Lola décide alors d’abandonner ses biens et consacre ses dernières forces à prêcher la bonne parole aux foules attentives.

Épuisée par ce dernier combat, elle décède d’une hémorragie cérébrale en 1861. Elle n’a que 40 ans.

Lola Montès une femme fatale envoûtante

Véronique Proust