Histoire de l’hôtel de la Marine. Chef-d’oeuvre d’Ange Jacques Gabriel, ce bâtiment a abrité le garde-meuble de la Couronne jusqu’à la Révolution Française. Puis il fut l’hôtel de la Marine. Depuis 2015, le bâtiment géré par les Monuments Nationaux a fait l’objet de très belles restaurations..

Tout commence par le don des Échevins de Paris d’une statue équestre de Louis XV devant figurer au centre d’une nouvelle place. Oeuvre d’Edme Bouchardon , elle représente le roi « à la romaine », c’est-à-dire sans selle ni étriers. Après avoir longtemps hésité, le roi désigne un emplacement entre le jardin des Tuileries et les Champs-Elysées pour créer une place. On lance un concours d’architecture mais sur les 19 propositions faites, aucune ne plaît au roi. Finalement on choisit Ange-Jacques Gabriel. En effet, le roi apprécie son parti de construire deux bâtiments identiques au nord, répondant au-delà de la Seine aux deux hôtels identiques de Bourbon et de Lassay. Cette place devient la place royale et prendra après la Révolution, le nom de place de la Concorde.

En 1765, on installe dans le bâtiment nord-est l’hôtel du Garde-Meuble. Il s’agit d’une institution chargée de créer et gérer le mobilier des maisons royales. Ces dernières comprenaient Versailles, Compiègne, Fontainebleau, Marly, Choisy, le Trianon, Montreuil et St Germain-en-Laye. Elle abrite aussi la collection royale d’armes et d’armures. Elle conserve aussi les bronzes, les étoffes, tentures, vases, pierres dures et surtout les bijoux de la Couronne. Enfin elle restera dans ce bâtiment pendant 25 ans, jusqu’à la Révolution Française. A l’origine, elle ne devait occuper qu’une partie du bâtiment. Mais elle finit par occuper tout l’espace ne serait-ce que pour accueillir des lieux de stockage, des ateliers et des appartements de fonction. Il y avait aussi une galerie d’exposition et même une chapelle.

Le bâtiment devint très vite le lieu emblématique du pouvoir royal. Aussi, à la veille du 14 juillet 1789, des révolutionnaires s’emparèrent des armes exposées dans la galerie des armes. Puis le 16 septembre 1792, une quarantaine de personnes pénétrèrent dans la salle des bijoux et dérobèrent un bulletin de près de 30 millions d’euros. Par ailleurs, le roi Louis XVI quitta Versailles pour les Tuileries. Et ses ministres devaient aussi être présents dans la capitale. Aussi on affecta l’hôtel au Ministère de la Marine qui resta dans les lieux pendant 226 ans.

En réalité, on transforma le Ministère de la Marine en secrétariat d’État après la Seconde Guerre Mondiale pour disparaître en 1961. Le bâtiment abrita alors plusieurs ministères jusqu’en 1977. En effet, le Premier Ministre Raymond Barre fit restituer le bâtiment à la Marine Nationale. Cette dernière réorganise l’espace pour installer des bureaux, installe le téléphone, l’électricité, des ascenseurs. Les pièces les plus prestigieuses deviennent des lieux de réceptions. En 2015, la Marine Nationale qui occupait les 20 000 m2 de bureau quitte son site historique pour rejoindre le complexe de Balard, qui rassemble tous les états majors dans le XVème arrondissement.

L’institution du garde-meuble va être supprimée de facto après la chute de la monarchie. Une partie des meubles est vendue aux enchères. Une autre est brûlée, pour récupérer les métaux précieux qui la constitue. En 1800, le Consulat restaure l’institution en la nommant Mobilier Impérial. Puis en 1870, l’institution deviendra Mobilier National. Aujourd’hui le mobilier national est installé aux Gobelins dans un bâtiment en béton construit par Auguste Perret. Sa fonction est de gérer l’ameublement de Élysées, Matignon et plusieurs consulats et ambassades. Elle prête et entretient les objets de sa collections qui contient près de 200 000 meubles et objets d’art.

En 2015 au départ de la Marine, les Monuments Nationaux prennent la gestion du bâtiment et entament une restauration des appartements de fonctions et des galeries du XVIIIe siècle. Il s’appelle désormais l’hôtel de la Marine.

Une restauration exemplaire.

Depuis 2015, l’hôtel faisait l’objet de nombreuses convoitises. Si bien qu’on organisa une commission sous l’égide de Valéry Giscard d’Estaing. Ce dernier décida que le monument devait être restauré, ouvert au public. On attribua la charge de l’établissement aux Monuments Historiques pour gérer une restauration d’un coût de 130 millions d’euros. Pour financer cette restauration, on a contracté sur 25 ans un emprunt de 80 millions d’euros. La  location des second, troisième et quatrième étage étages permettront couvriront le remboursement. Enfin les bâches publicitaires couvrant la façade pendant les travaux auront, elles, rapporté 20 millions d’euros (1).

Grâce aux inventaires scrupuleux tenus par les deux intendants, on a pu restituer les peintures telles qu’elles l’étaient à la veille de la Révolution, c’est-à-dire bien avant les multiples aménagements du ministère. Par ailleurs, la majorité des meubles que l’on peut voir aujourd’hui n’y étaient pas à l’origine. Une quête minutieuse auprès des antiquaires et des puces ont permis de reconstituer le décor tel qu’il était autrefois. Enfin le musées du Louvre, des Arts Décoratifs et de Versailles ont prêté plusieurs meubles proches du décor initial de l’hôtel.

(1): information supplément Beaux Arts Magasine, « Hôtel de la Marine ».