Klimt peintre de la Sécession viennoise

Fils d’un orfèvre viennois Gustave Klimt est né le 14 juillet 1862 à Vienne. Il est le premier d’une famille de 7 enfants dont le père est orfèvre et la mère chanteuse lyrique. Il témoigne très tôt d’un goût pour le dessin et intègre l’école des Arts et Métiers de Vienne en 1878. La même année, il travaille avec le peintre d’histoire Hans Makart à de nombreuses commandes officielles.

En 1880 il ouvre un atelier de décor de théâtre et de peinture murale avec son frère Ernst et son compagnon d’étude Franz Match. IL a d’importantes commandes comme celle de l’escalier du Burgtheatre de Vienne entre 1886 et 1888. Puis il travaille au décor d’une des salles du château Royal de Palesh en Roumanie. Il réalise également avec Franz Match les 40 médaillons décorant les escaliers des bâtiments du Kunsthistorishe de Vienne.

Son style est alors très académique. Pourtant ses premières œuvres rencontrent une incompréhension de la part du public. Notamment pour le grand hall de l’université de Vienne où ses fresques changent radicalement de style. Délaissant le style académique il fait figurer trois femmes sylphides et presque décharnées à la grande chevelure noire et rousse entourées d’un halos de cubes dorés. Le regard mystérieux de ses femmes censées représenter la médecine, le droit et la philosophie, attire les critiques. En effet, on accuse le peintre de perturber les jeunes esprits et d’encenser le libertinage. L’affaire fait grand bruit.. Certaines toiles ne seront jamais accrochées et le ministre de l’éducation doit démissionner. Par la suite, les toiles disparaîtront en 1945 sous l’incendie provoqué par les SS.

Klimt comprend qu’il doit se retirer des commandes officielles où les conservateurs entravent toute nouveauté, avec 20 autres artistes viennois il fonde la Sécession en 1897. Ce n’est pas un projet expressif précis mais plutôt une réflexion sur l’art qui regroupe aussi bien les peintres que les architectes et les sculpteurs.

En 1907 lors de la 14e exposition, la Sécession viennoise décide de rendre hommage à Beethoven . Klimt réalise une grande toile où il évoque l’humanité, la beauté, l’espérance à travers une série de figures recouvertes de robes dorées. Klimt a recours pour la première fois à l’application de la fleur d’or. Il veut réaliser ici une œuvre d’art total qui réunisse la peinture la musique et l’architecture. En effet, sa toile couvre 3 murs du bâtiment réalisé par l’architecte Josef Olbrich.

L’année suivante Josef Hoffmann et Koloman Moser fondent l’atelier Viennois, sorte d’atelier regroupant tous les arts. Klimt les rejoint et se concentre sur la figure féminine et dresse un constat sans concession du rapport ambigu entre le masculin et le féminin. Ainsi, la femme fatale et fragile deviennent ses sujets principaux. Leur représentation mystérieuse relève aussi de l’angoisse de la mort et la prise en compte des recherches psychanalytique. Les femmes sont représentées soit comme des objets sexuels soit comme des êtres suprêmes. Les femmes de Klimt sont à la fois soumises et affirmées.

Avec sa « Judith » Klimt donne une version très personnelle de la Judith antique qui tua Holopherne pour sauver son peuple. En effet, dans un cadrage très resserrée et presque entièrement doré, il présente une femme « fatale » et évanescente. Klimt a recours à l’expressionnisme pour rendre un visage et une peau quasi symboliste. Ainsi il éclipse la personne réelle et empêche le regard masculin de l’atteindre en profondeur. Dans cette vision de femme fatale et adulée à la fois, Klimt reflète les fantasmes de son époque. Celle d’une Vienne très ancrée dans sa tradition impérialiste et en quête d’une modernité européenne.

A partir de 1900, Klimt réalisera de nombreux cycles décoratifs et travaillera pour une clientèle privée. Par exemple, il réalise pour le banquier belge Adolphe Stoclet une magnifique mosaïque murale pour sa salle à manger à Bruxelles. C’est Josef Hoffmann qui réalise ce palais luxueux  en 1904. Dans la salle à manger, quatre panneaux ornent les murs. On y voit d’abord un arbre de vie aux sinueuses branches qui couvrent tout l’espace. Dans des harmonies de bruns et de vieux roses, quelques carrés dorés s’invitent.

Apparaît dans un autre panneaux une femme à l’allure de geisha et au regard mystérieux. Son corps entier est recouvert d’une robe aux même couleurs. Seul le visage émerge de cet univers céleste. Enfin la fresque la plus intense est sans doute « l’Accomplissement ». Elle représente un couple enlacé et intimement unis dans un grand tissus d’où n’émergent que la tête au visage assouvi de la femme et des cheveux noirs de l’homme qui l’enlace.

Dans toutes ses séries, le rôle du tissus ou du kimono japonais est fondamental. Gustave Klimt lui-même travaillait en kimono et le japonisme est très présent dans son art. Sa compagne, Emilie Flöge possédait une maison de couture à Vienne pour laquelle Klimt dessina de nombreux tissus. Emilie était féministe et travailla beaucoup à l’abandon du corset au profit de la « robe réformée » sorte de robe-sac sans taille. Le collaboration du couple est d’autant significative que ces robes paraissaient être une toile de  Klimt et que les fresques de Klimt représentaient ces robes.

A la fin de sa vie, Klimt s’intéresse davantage aux portraits intimistes. Il mourra en 1918 et sera enterré à Vienne.

Klimt, peintre de la Sécession viennoise

Véronique Proust