La maison Cauchie chef-d’oeuvre de l’Art Nouveau bruxellois. Sa façade est une publicité pour le travail de décorateur et de graphiste de Paul et Lina Cauchie. A l’intérieur se trouve un décor mural sauvegardé grâce à Guy Dessicy qui sauva cette maison de la démolition.

UNE FORMATION AUX BEAUX-ARTS

Né en 1875 à Ath, Paul Cauchie entre à 16 ans à l’Académie des Beaux Arts où il étudie la peinture et la technique du sgraffite et suit des cours de peinture décorative. Puis il voyage en Italie et devient un des premiers élèves de la classe des Arts Décoratifs. A l’académie, il rencontre sa femme, Carolina, dite Lina. Cette dernière est une femme et n’a droit qu’à des cours réduits. Mais sa persévérance lui fait atteindre un très bon niveau de dessin. Dans sa classe, les modèles sont habillés et les modèles masculins partiellement dévêtus. Et cela réduit de nombreuses artistes féminines aux seuls portraits. Aussi, Lina excellera dans la représentation du visage.

Quant à Paul Cauchie, en dehors de son activité d’architecte décorateur, on lui doit aussi des peintures à l’huile, représentant des paysages ou des portraits.

UN COUPLE D’ARTISTE

Le couple se marie en 1905 et décide de travailler ensemble. A cette époque, les artistes qui travaillent en couple ne sont pas rares. Par exemple, Maria Sèthe contribue aux recherches de son mari Van de Velde. Bien qu’on ne connaisse pas la teneur exacte de la contribution de son épouse, on sait que Paul travaille beaucoup avec elle et que les commandes affluent.

la maison Cauchie a été construite à un emplacement stratégique d’un quartier en pleine construction. En effet, la bourgeoisie s’installe dans cette commune d’Etterbeek de Bruxelles pour s’éloigner du centre et des quartiers populaires. Mais elle n’est pas aussi riche que celle qui s’adresse à Horta. C’est pourquoi le couple propose de décorer simplement les façades avec la technique du sgraffite. Sur la façade de la maison, un en-quart donne la liste des savoirs-faire du couple. Ainsi propose-t’il des peintures, dessins, broderies d’art et applications diverses. Et ces dernières peuvent s’appliquer sur des menus, des partitions, des faire-parts, des murs, des façades.

LE SGRAFFITE

La façade et le décor intérieur de la maison Cauchie représentent un parfait exemple du sgraffite. Cette technique, proche de la fresque, consiste à recouvrir le support d’un enduit ou un mortier frais et de l’inciser. Tant que l’enduit est frais, on peut lui appliquer des couleurs diverses. Cauchie remet à l’honneur une technique ancienne un peu oubliée..

Paul Cauchie s’inspire du symbolisme. Ses femmes rappellent aussi les visages de Burnes Jones. Sur la façade, il a représenté les muses des arts. Mais il tient à rappeler l’importance des appliqués. Aussi y représente-t’il les muses de la bijouterie et la dinanderie aux côtés de celles de l’architecture, la sculpture et la musique.

UN ART NOUVEAU TRÈS PERSONNEL

Le style inspiré tout autant de l’école de Glasgow ou du japonisme donne un aspect particulier à cette façade assez étroite. D’abord, le japonisme se traduit dans les temps de pause et de silence de la lecture de la façade. Ils se traduisent par des vides et des pleins, des formes carrées que succèdent des formes rondes. Les roses rappellent le style Mackintosh. Les voiles qui encadrent le visage des jeunes femmes rappellent les voiles de Loï Fuller. Dans le salon du premier étage l’ensemble décoratif est aussi réalisé au sgraffite. On y voit des muses qui se regarde dans un miroir accompagné d’un masque Nô. Une autre est accompagné d’un paon, oiseau que l’on retrouve dans de nombreuses maisons bruxelloises. Enfin le découpage de la fenêtre reprend le motif du Torii japonais.

Paul Cauchie meurt en 1932. Sa veuve loue le premier étage ce qui provoque de nombreuses dégradations. Puis, sa fille, Suzanne reprend la maison mais le décor ne correspond plus à son goût. Elle loue le premier étage  ce qui provoque de nombreuses dégradations. Certaines décorations sont enlevées. Elle envisage même de détruire la maison pour créer un immeuble de rapport. C’est alors, dans les années 70, que Guy et Léo Dessicy décident d’acheter la maison et de la restaurer.