Les artistes à Montmartre, lieux et ateliers mythiques au musée de Montmartre. La fin du XIXe siècle accueillit dans ce quartier singulier toute la Bohème de Paris.  On évoquera Emile Bernard, Utrillo, Derain, Toulouse Lautrec Willette, Delâtre, Renoir et bien d’autres encore.

Pour comprendre la Bohème de Montmartre, il faut entrer dans l’univers fragile de cette butte ignorée du centre de la capitale que l’on appelle le Maquis de Montmartre. En effet, ici, entre la rue de Caulaincourt et la rue Cortot, existe un bidonville. Il est constitué de baraques en bois et de masures aux allures de chalets. Il abrite une population de chiffonniers, artisans, peintres et prostituées. Aussi, entre 1880 et 1902, toute une population marginale s’y retrouve dans une ambiance, où la fracture sociale n’existe pas. Ainsi, un Toulouse Lautrec issu de la plus vieille aristocratie française, voisine avec des fils d’ouvriers ou de marins. Ainsi en est-il de  Van Gogh , Paul Gauguin , Émile Bernard. Suzanne Valadon elle-même fille naturelle de blanchisseuse, vient ici pour vivre libre et tenter sa chance d’artiste.

Au milieu de ces baraques en bois s’érigent aussi des ateliers d’artisans, petites manufactures familiales qui vivent dans des ateliers lumineux propres à la petite création industrielle. Modigliani vit dans l’une d’elles. Mais quand la grande industrie de la Révolution s’impose, les ouvriers mécaniciens émigrent et laissent leurs ateliers vides. L’un d’entre eux deviendra le Bateau lavoir investi par Van Dongen. Ainsi, c’est une occasion pour les peintres d’investir ces lieux improbables pour y créer, à l’abri du chaos de la ville en mouvement, des œuvres qui feront l’avant-garde du XXe siècle.

Au 73 rue Caulaincourt, Steinlein, artiste suisse, réalise des caricatures anarchistes que les journaux l’Assiette au Beurre ou Gil Blas se disputent. Mais son truc, c’est le chat, cet animal énigmatique qui l’attire au point de réaliser l’affiche du cabaret le Chat Noir. Là, il fait trôner un magnifique Chat Noir aux yeux jaunes qui harangue le parisien. Il l’invite aussi à venir s’encanailler dans un cabaret hors du commun.

Plus loin, 12 rue Cortot, c’est Auguste Renoir qui s’installe pour se rapprocher du Moulin de la Galette. Il le peindra pour en faire un des tableaux les plus forts de la peinture occidentale. Par ailleurs, il est aussi le voisin d’Émile Bernard qui crée un genre nouveau aux cotés de Gauguin. Puis, c’est Suzanne Valadon et Maurice Utrillo qui s’installeront pour peindre les plus beaux paysages de Paris.

Au 22 rue Tourlaque à la cité des Fusains, c’est l’avant-garde révolutionnaire qui s’installe. En premier lieu, Derain y met en place les principes d’un cubisme qui influencera Picasso, installé plus loin, au Bateau-Lavoir. Puis, viennent le rejoindre Jean Arp, Juan Miro ou Max Ernst. Alors qu’au 5 rue Tourlaque le vieux Toulouse-Lautrec continue de portraiturer des conteuses et des peintres, en vue de faire des affiches d’ans l’atelier d’imprimerie qu’Eugène Delâtre met à leur disposition.

Enfin, au cabaret le Lapin Agile, c’est l’âne du propriétaire Frédé qui attire. En effet, les artistes de la Bohème sont si remontés contre l’Académie, qu’on attache un pinceau à la queue de l’âne pour qu’il dessine avec elle une toile que l’on baptisera Et le soleil s’endormit sur l’Adriatique. La toile présentée au Salon des Indépendants trouve même acquéreur.

La Butte de Montmartre regorge de ces lieux mythiques qui ont fait la gloire de la peinture française d’avant-garde. Ils existent encore. Certains sont entretenus, d’autres restaurés, et des artistes vivent encore dans leurs lieux.